23 Juillet 2021

Télémaque : 3, 2, 1... Piégez !

Déplacer, manipuler, étudier des objets ou des liquides sans jamais entrer en contact avec eux : tel est l’objectif de la « pince acoustique » Télémaque. Développée par les ingénieurs du CNES et arrivée dans l’ISS en juin 2021, cette expérience a été réalisée à bord le 20 juillet 2021 par Thomas Pesquet, astronaute français de l’ESA. En direct, dans la salle de contrôle du CADMOS – centre opérationnel du CNES dédié aux activités en micropesanteur – la concentration des ingénieurs et scientifiques n’avait d’égal que leur joie de voir se concrétiser 2 ans de travail et de préparation. Retour sur 2 heures intenses et riches d’enseignements.



Il est 17h55 le 20 juillet 2021 lorsque les écrans de la salle de contrôle du CADMOS s’allument : pour la première fois, la liaison vidéo avec l’ISS se fait en haute définition. Une première pleine de surprises puisque la vidéo était… à l’envers ! Avant de débuter l’expérience, le centre de contrôle* a donc demandé à Thomas Pesquet et son coéquipier, Mark T. Vande Hei, de retourner la caméra, une situation insolite qui n’a pas manqué de faire sourire.

*Le saviez-vous ? Lors de la mise en œuvre d’une expérience à bord de l’ISS, les ingénieurs du CADMOS peuvent entendre les astronautes mais ne peuvent pas leur parler directement. Ils s’adressent à Eurocom, un centre de contrôle situé à Cologne ou Munich selon les cas, qui transmet le message vers l’ISS.

Vers 18h15, le protocole de l’expérience Télémaque peut débuter. Il s’agit pour Thomas Pesquet de réussir à piéger successivement, dans le champ d’ultrasons de la pince acoustique Télémaque, 12 petites billes de masses, compositions et diamètres différents. Et ce n’est pas une mince affaire ! Sur Terre, déjà, le positionnement de la bille au centre du champ acoustique peut s’avérer compliqué, alors en micropesanteur, Thomas Pesquet a dû s’armer de patience.

Après plusieurs échecs, quand l’une des billes reste enfin piégée dans le champ acoustique, c’est le soulagement : « Il a réussi ! » peut-on entendre dans la salle de contrôle.


Après presque 1h30 d’opérations, les ingénieurs et scientifiques sont ravis : l’expérience a été un succès. Le centre de contrôle donne le feu vert pour le rangement du matériel : la session est terminée.

Régis Marchiano, chercheur à l'Institut Jean le Rond d'Alembert (Sorbonne Université / CNRS), témoigne :

Même si certains objets ont été difficiles à capturer (notamment les plus gros), tous l’ont été au moins pendant quelques secondes, démontrant que la force de pression des ultrasons peut être maîtrisée et utilisée pour le piégeage. L’analyse fine de cette séance sera passionnante. Elle fera sans nul doute avancer la compréhension physique du phénomène et, espérons-le, permettra de dégager des pistes d’amélioration du protocole et du procédé pour les futures applications.



« S’il est trop tôt pour avoir une idée des résultats, il semble déjà évident que nous allons apprendre beaucoup de cette première session pleine de surprises. Car aucune des billes n’a été facile à capturer, en dépit des différences de taille et de masse », 
ajoute Sébastien Rouquette, responsable de l’expérience Télémaque au CNES. 

Télémaque préfigure de nombreuses applications : déplacement d’objets délicats sur des lignes d’assemblage robotisées, manipulation de liquides tels que des produits dangereux sur Terre mais aussi dans l’ISS, prélèvement d’échantillons — sans les contaminer — dans un contexte d’exploration extra-planétaire, administration ciblée de médicaments, élimination de calculs rénaux, déplacements de petits organismes vivants ou de virus...

A bord de l’ISS, une deuxième session devrait se dérouler courant octobre. 
Pour suivre la suite des aventures de Télémaque, restez connectés !


is_p66279_vignette_experiencetelemaque_alpha.jpg
Écusson de l’expérience Télémaque. Crédits : CNES/GRARD Emmanuel, 2021.

Partenaires de l'expérience Télémaque


L'Institut Jean-Le-Rond-d’Alembert (Sorbonne Université / CNRS) pour le concept et l’exploitation scientifique

La société COMAT pour la réalisation de la mécanique

La société EREMS pour la réalisation de la partie électronique

alpha_experiences-francaises_ecusson.jpg

LES EXPÉRIENCES FRANÇAISES DE LA MISSION ALPHA

Télémaque fait partie des 12 expériences développées en France, par le CADMOS, au titre de la contribution nationale du CNES à la mission Alpha. 

Sciences, technologie, expériences étudiantes et éducatives... À travers ce programme, le CNES cherche notamment à apporter des améliorations au laboratoire de pointe qu’est l’ISS, afin que les scientifiques puissent continuer de faire avancer le progrès depuis l’espace, pour la Terre. Il s’agit également de soutenir la recherche scientifique française et les avancées technologiques dans la perspective de l’exploration du système solaire et des missions spatiales habitées lointaines.

→ Découvrir les expériences développées par le CADMOS